LES SNOWBIRDS DU QUÉBEC

2 décembre 2010

Chaque année, plus d’un million de Canadiens vont faire un séjour en Floride afin de fuir notre hiver rigoureux et de profiter d’une température plus clémente. Il y a aussi le fisc américain qui fait preuve de clémence… jusqu’à maintenant.

En effet, bien que la plupart de nos vacanciers retraités ne connaissent pas les règles fiscales américaines, une certaine « intuition » les fait rapatrier au Canada avant six mois. Pourquoi six mois? Il semble que bien des concepts soient mélangés lorsqu’il s’agit de séjours prolongés à l’extérieur du pays.

Il est vrai que pour les fins de l’assurance-maladie du Québec, afin d’être couvert, un individu ne doit généralement pas s’absenter plus de 182 journées complètes du Québec pendant une année. Ne serait-ce que pour cet élément, il vaut la peine de rentrer au bercail sans excéder la limite de temps. Mais au niveau fiscal, les règles diffèrent et vos clients seraient mieux d’en être avertis.

Tout comme au Canada, les résidents fiscaux américains doivent payer de l’impôt sur leur revenu mondial. Par ailleurs, ce n’est pas parce qu’on est résident d’un pays qu’on ne l’est pas pour l’autre en matière de fiscalité. Des conventions entre pays existent afin de réduire ou d’éliminer la double imposition et un mécanisme de crédits d’impôt pour impôt étranger vient réduire presque à néant les possibilités de devoir payer de l’impôt deux fois sur un même revenu.

Mais entre vous et moi, même si vous n'étiez pas assujettis à cette double imposition, ne vaut-il pas la peine d’éviter de faire affaire avec le fisc américain? Comment faire alors pour éviter de devoir affronter l’Internal Revenue Service (IRS)?

Tout ce qu’il faut faire est de ne pas être considéré comme un résident fiscal américain en respectant quelques règles de base. Premièrement, les Etats-Unis considèrent leurs citoyens comme des résidents fiscaux. Les citoyens américains ne peuvent donc pas y échapper même s’ils n’ont jamais mis le pied aux Etats-Unis après leur naissance. Pour les non citoyens américains, il y a les personnes avec le statut de « résident permanent » qui n’ont pas non plus le choix. Ces personnes possèdent la green card. Vos clients n’entrent probablement pas dans cette catégorie.

Reste une dernière façon d’être considéré résident fiscal américain : le substantial presence test où les personnes non exemptées par la loi doivent limiter la durée de leurs séjours aux Etats-Unis. Ces personnes ne doivent pas passer plus de 182 jours aux Etats-Unis dans une année. Mais attention! Il ne s’agit pas seulement des journées effectivement passées dans cette année civile mais également d’une fraction (1/3) des journées passées au cours de l’année précédente et une autre fraction (1/6) des journées passées l’année d’avant.

Par conséquent, un individu séjournant à chaque année aux Etats-Unis ne doit pas passer plus de 121 jours sur une base continuelle afin de ne pas être considéré comme un résident fiscal américain et ainsi devoir remplir une déclaration de revenu américaine.

Cela signifie que si vous quittez le 1er décembre de chaque année, vous devriez être dans l’avion au plus tard le 31 mars – et ne pas retourner aux Etats-Unis pour d’autres séjours pendant l’année. Vous connaissez probablement de ces personnes qui ont excédé cette limite et n’ont jamais fait quoi que ce soit. Si tel est le cas, cela signifie que l’IRS ne s’est pas rendu compte de leur incartade. Faudrait-il s’en inquiéter? Je ne sais pas mais ce qui est certain, c’est qu’à compter de maintenant, il faudrait remédier à la situation… et heureusement, pas nécessairement en rentrant plus tôt au Canada.

Il existe en effet un formulaire appelé Closer Connection Exception Statement for Aliens – le formulaire 8840 – qui peut être complété et qui fait en sorte qu’une personne peut être soustraite du statut de résident fiscal américain si les quatre conditions suivantes sont remplies :

  • elle doit aviser l’IRS au plus tard le 15 juin suivant l’année en cause;
  • elle atteste qu’elle a un lien plus étroit avec le Canada et qu’elle y réside;
  • elle ne doit pas avoir entrepris de démarche pour obtenir le statut de résident permanent des Etats-Unis;
  • elle a réellement séjourné moins de 183 jours au cours de l’année civile en cause.

Notons en terminant qu’il y a plusieurs règles techniques qui font en sorte qu’une personne peut être exemptée de ce fardeau. Ces règles visent notamment les séjours de moins de 10 jours et certaines catégories de personnes dont les chercheurs, les représentants d’un autre pays et les commuters, soit les personnes traversant quotidiennement les lignes frontalières pour fins de travail.

En résumé, remplissez ce fameux formulaire car la clémence de l’IRS a peut-être des limites...