Le gain en capital et la résidence principale : pas toujours évident

8 août 2012

Il existe quelques mythes en relation avec la désignation de résidence principale pour les personnes détenant une résidence secondaire. Il est important de bien connaître les règles car elles peuvent éviter des erreurs de planification. Afin de maximiser le gain en capital non imposable sur la disposition d’une résidence, revoyons quelques-unes de ces règles.

Une résidence principale, telle que définie à l’article 54 de la Loi de l’impôt sur le revenu (L.I.R.), n’a pas à être désignée à chaque année. En fait, elle doit l’être pendant l’année où il y a disposition d’une propriété désignée comme résidence principale -formulaire TP 274 au Québec - . Par position administrative, l’Agence du revenu du Canada n’oblige pas la déclaration - formulaire T2091 (IND) - si aucun gain en capital imposable n’est généré par la disposition. Il est tout de même suggéré de remplir ce formulaire pour éviter tout problème. En passant, une disposition inclut la vente de la propriété, l’accord d’une option d’achat et l’octroi d’une servitude réelle.

La résidence principale d’un individu n’est pas nécessairement la résidence qu’il occupe principalement pendant une année donnée. En plus d’appartenir en totalité ou en partie au contribuable, elle doit simplement avoir été occupée par ce dernier, son conjoint, son ex-conjoint ou son enfant mineur « à un moment donné » pendant une année afin de pouvoir être désignée comme telle. Il n’est donc pas question, ici, d’occuper de façon « régulière » ou « continue » la résidence choisie.

De plus, la résidence peut être l’une des habitations suivantes : une maison, l’appartement d’un duplex, d’un immeuble locatif ou d’un immeuble en copropriété (condominium), un chalet, une maison mobile, une caravane (roulotte) ou une maison flottante. Tant que cette habitation n’est pas utilisée principalement pour gagner des revenus, elle peut être désignée comme résidence principale selon le bulletin d’interprétation IT-120R6 de l’ARC.

À noter que le terrain sur lequel est située l’habitation fait également partie de la résidence principale jusqu’à concurrence d’une superficie de 5 000 m2 (environ 53 820 pieds carrés), à moins d’exceptions telles un règlement municipal qui obligerait une superficie supérieure ou encore une distance importante entre la route et le bâtiment.

Il existe par ailleurs une règle qui donne un léger allègement au contribuable, en vertu de l'alinéa 40(2)b) L.I.R. Cette règle permet d’ajouter une année au nombre d’années désignées afin de déterminer le ratio de gain en capital exonéré. Cette règle tire sa logique dans le fait qu’elle permet de considérer l’équivalent de deux résidences principales lors d’une année où il y a disposition.

Par exemple, si une résidence a été la propriété d’un contribuable pendant 25 ans et que ce dernier la désigne comme résidence principal e pour 15 ans au moment de sa disposition, le gain en capital exonéré sera de 16/25 du gain en capital total. Le gain en capital non exonéré sera donc de 9/25. Si le gain en capital était de 250 000 $, le gain en capital imposable serait de la moitié de 9/25, soit 45 000 $.

Une seule résidence principale peut être désignée par « unité familiale » depuis 1982. Une unité familiale comprend généralement le conjoint et les enfants mineurs. Attention à la bigamie fiscale. Si un contribuable a un nouveau conjoint de fait mais qu’il n’est pas séparé légalement ou divorcé de son époux, ce dernier fait encore partie de l’unité familiale… problème en vue!

Lorsque les bénéficiaires d’une fiducie sont considérés des « bénéficiaires  déterminés » et que la fiducie propriétaire d’une habitation la désigne comme résidence principale, ces derniers ne peuvent désigner une autre résidence principale au cours de la même année. Un bénéficiaire déterminé est une personne qui a un intérêt dans la fiducie et qui a utilisé (elle-même, son conjoint ou ex-conjoint ou son enfant mineur) l’habitation pendant la période en cause.

Généralement, une résidence principale peut tout de même être désignée pour une période maximale de quatre années si elle a servi à gagner des revenus de location et qu’aucune déduction pour amortissement n’a été demandée. Pour ce faire, un choix doit être effectué par le contribuable et la résidence doit avoir été l’objet d’un changement d’usage, c’est-à-dire être passée d’un immeuble à revenus à une habitation primaire ou secondaire ou vice versa. Pour les habitations qui servent à la fois d’immeuble commerciale et de résidence, un pro rata est effectué pour l’exonération.

La désignation est donc une question de choix lorsqu’un contribuable détient plus d’une propriété et qu’il dispose de l’une d’elles. Il effectuera son choix en minimisant le gain en capital imposable soit dans l’immédiat, soit au cours de sa vie ou au décès.

Si une personne désire réduire son gain en capital imposable au minimum au moment de la disposition, il désignera la propriété vendue comme résidence principale pour un nombre d’années maximal.

Si, par contre, le contribuable a le souci d’optimiser sa situation fiscale, il pensera peut-être au gain en capital futur qu’il perdrait sur une propriété au profit de l’autre. Ainsi, un calcul devra être effectué pour comparer le gain en capital imposable actuel et celui prévu dans le futur selon des hypothèses d’appréciation de la juste valeur marchande des habitations conservées. Ainsi, le contribuable devra répondre à une question du genre : « Vaut-il mieux sauver 50 000 $ aujourd’hui ou 100 000 $ dans 20 ans?

Si la disposition de ces habitations est prévue dans un avenir lointain, il serait préférable d’actualiser les économies d’impôt sur les gains futurs afin de comparer « des pommes avec des pommes ».

Si l’on veut être précis, la façon la plus efficace d’illustrer cette actualisation est de projeter des scénarios complets. L’un illustrant une économie d’impôt immédiate investi dans un véhicule enregistré ou non selon l’espace disponible et les autres en indexant les tables d’imposition au taux d’inflation et en générant les gains en capital dans le futur. Le tout en considérant les autres revenus imposables du contribuable, la répartition d’actif de son portefeuille non enregistré, ses besoins de liquidité et ses taux d’imposition implicites… évidemment! J’allais oublier… l’impôt minimum de remplacement… Simple, n’est-ce pas?

Quoique de tels calculs soient souvent inutiles, je pense que si vous êtes en mesure de les faire, vous pourrez voir la sensibilité des scénarios aux différentes hypothèses et peut-être que votre recommandation sera plus nuancée que celle d’un concurrent… et le comptable du client pourrait très bien apprécier…