7 juin 2011
Le budget fédéral déposé hier contient deux mesures touchant de près les particuliers et leurs finances personnelles.
La première consiste en une modification des règles d’attribution. Une exception de taille était prévue dans ces règles : la réalisation d’un gain en capital par un enfant mineur ayant un lien de dépendance avec un contribuable ayant prêté ou transféré un bien en faveur de cet enfant.
Dans ce cas, le gain en capital était toujours imposé dans les mains de l’enfant, contrairement au revenu d’intérêt ou de dividende, tel qu’il est prévu au paragraphe 74.1(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu.
Avec le budget 2011, il est prévu que la définition de gain en capital provenant de la disposition d’actions d’une société soit assimilée à celle de dividende. Comme les dividendes sont visés par les règles d’attribution, ce sera l’adulte qui sera imposé sur le gain en capital généré dans cette situation. Une possibilité de fractionnement de revenu en moins…
La deuxième mesure touche les régimes de retraite individuels, ou communément appelés, les RRI. Lors de la mise en place d’un RRI pour un individu dans la quarantaine, les cotisations nécessaires au financement du régime sont supérieures aux limites maximales de cotisations dans un REER, d’où l’intérêt d’un RRI par rapport à un REER. Cet intérêt existe toujours avec les modifications proposées.
Cependant, le principal attrait de l’instauration d’un RRI provenait du fait que des cotisations massives pouvaient être injectées dans le régime, sous certaines conditions, afin de racheter des années de service dans le passé. Ce rachat créait ce qu’on appelle un facteur d’équivalence pour services passés, ou FESP.
Un FESP est simplement une correction rétroactive des facteurs d’équivalence qui auraient dû être déclarés si l’individu avait acquis des crédits de rente dans le passé. Le FESP doit être approuvé par l’Agence du revenu du Canada afin qu’un contribuable ne puisse profiter de cotisations « en double » lors de ces années passées.
Pour ce faire, les droits de cotisations au REER inutilisés d’un contribuable devaient être au moins égaux au FESP moins 8 000 $. Si tel n’était pas le cas, un transfert devait avoir lieu afin de ramener le FESP à ce niveau.
Prenons l’exemple d’un individu qui dispose de 40 000 $ de droits de cotisations à un REER inutilisés. Si la mise en place de son RRI avait généré un FESP de 60 000 $, un transfert de sommes déjà enregistrées (par exemple des sommes provenant d’un REER) au montant minimal de 12 000 $ devait être effectué afin de financer le régime. Ce transfert aurait ainsi réduit le FESP à 48 000 $, soit les droits inutilisés de l’individu plus 8 000 $.
Si notre individu avait 80 000 $ de droits de cotisation à un REER inutilisés, le FESP de 60 000 $ aurait simplement réduit les droits inutilisés à 20 000 $.
Pendant ce temps, le coût du rachat, calculé par un actuaire, pouvait être de 85 000 $, entièrement déductible car le FESP déclaré aurait été inférieur à la limite de 88 000 $ de cet individu (80 000 $ de droits inutilisés plus 8 000 $ de marge).
On se retrouvait donc dans la situation où un individu (sa société) pouvait déduire 85 000 $ et il restait au contribuable encore des droits inutilisés de 20 000 $.
L’une des modifications a trait à ce montant. Le gouvernement considère que cette situation était inéquitable. Louis Martin, FSA, FICA, président de CGAS, n’est pas de cet avis. « Il s’agit d’une mauvaise solution appliquée à un faux problème », précise-t-il. « La mécanique des facteurs d’équivalence et des FESP est basée sur une moyenne.
Cela fait en sorte qu’un facteur d’équivalence est pénalisant pour un jeune individu et souvent trop généreux pour une personne plus âgée. Le problème soulevé ne fait que faire ressortir cet état de fait » ajoute-t-il.
La modification consiste donc à exiger du contribuable qu’il épuise ses droits inutilisés avant qu’une somme puisse être déductible par sa société. Dans notre exemple, l’individu devrait renoncer à ses 20 000 $ de droit inutilisés, le coût du financement excédant de 25 000 $ le FESP.
Si l’individu avait eu 100 000 $ de droits inutilisés, il ne lui aurait resté que 15 000 $ après l’instauration du régime car c’est le coût du régime qui vient réduire les droits inutilisés et non le FESP comme c’était le cas auparavant.
« Cette nouvelle règle affecte donc les droits inutilisés d’un contribuable dans la mesure où le coût du rachat excède le FESP, ce qui est justement le cas des contribuables mettant en place un RRI » conclut M. Martin.
Une autre modification ayant trait aux RRI exige que ces derniers soient assujettis aux mêmes retraits minimums que les FERR à compter de 71 ans. Cela implique qu’à l’occasion, certains régimes devront faire l’objet d’un retrait supérieur à ce qui était initialement prévu.
Je terminerai en mentionnant que d’autres modifications fiscales ont été apportées lors du dernier budget, notamment des mesures touchant les sociétés par actions associées (à plus de 10 %) de sociétés de personnes. Ces mesures sont davantage intéressantes pour les fiscalistes...