7 janvier 2011
Le 14 février prochain marquera une page importante dans l’histoire du droit corporatif québécois. En effet, la Loi sur les sociétés par actions du Québec (LSAQ) entrera en vigueur et remplacera ainsi l’actuelle Loi sur les compagnies du Québec (LCQ). Cette loi vise notamment à moderniser et à alléger le fonctionnement interne des sociétés par actions.
Ainsi, les « compagnies » disparaîtront pour faire place aux « sociétés par actions ». Ce changement de vocables constitue une harmonisation avec la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA), en vigueur depuis 1975, où le terme « compagnie » n’existe pas. De plus, les lois fiscales et le Code civil du Québec utilisent également le terme « société » et « société par actions » pour désigner une compagnie.
Cette loi compte 496 articles traitant du fonctionnement des sociétés par actions du Québec. D’autres articles s’ajoutent afin de tenir compte des impacts des autres lois touchées et afin d’indiquer les mesures transitoires et finales. Au total, elle compte 729 articles. A-t-on vraiment simplifié le droit corporatif?
La LSAQ se colle davantage à la LCSA sans pour autant en être une copie conforme. Elle constitue plutôt un heureux mélange de des parties I et IA de la LCQ avec la LCSA. Une consultation publique avait eu lieu en 2007 et plusieurs éléments de cette consultation ont été retenus. Par contre, l’aspect « PME » si lacunaire dans la loi fédérale, a été ignoré en grande partie. C’est ainsi que la plupart des articles de la nouvelle loi ont davantage trait aux grandes organisations qu’aux petites et il faut lire attentivement afin de découvrir les dispositions spécifiques aux PME.
Outre ces considérations, mentionnons qu’un des impacts les plus importants de cette nouvelle législation touche la protection accrue des actionnaires minoritaires, ce qui constituait un attrait important de l’ancienne loi pour les actionnaires majoritaires. En effet, bien que la jurisprudence civiliste se soit bien développée à l’égard des concepts d’ « abus des droits » et d’ « exercice raisonnable des droits », la LCQ protégeait les actionnaires minoritaires de façon moins efficace advenant une mésentente avec les actionnaires majoritaires.
Rappelons brièvement qu’il existe des droits préventifs et des recours curatifs lorsque la prévention ne fonctionne pas. Une des formes de droit préventif pouvant dorénavant être mise de l’avant par un actionnaire minoritaire est le rachat forcé de ses actions, à une valeur « juste », par la société en cas de désaccord avec certains changements majeurs apportés à la structure ou aux activités de cette dernière.
Le droit curatif, quant à lui, a été modifié de telle sorte que plusieurs mécanismes existent afin de rétablir une situation préjudiciable à un actionnaire minoritaire même si telle situation n’a pas encore eu lieu. Finalement, le droit curatif peut être exercé par un actionnaire minoritaire selon la bonne vieille méthode de « nuisance », c’est-à-dire l’utilisation réelle ou la menace de l’utilisation de tous les recours possibles de ce dernier afin de nuire aux opérations de la société pour forcer celle-ci à racheter ses parts.
Parmi les autres modifications apportées à la nouvelle loi, voici, en rafale, quelques-unes des plus importantes :
Les compagnies incorporées en vertu de la partie I de la LCQ auront cinq ans pour procéder à la rédaction de leur statut de continuation. Après ce délai, les compagnies seront automatiquement dissoutes. Quant aux autres compagnies, celles constituées en vertu de la partie IA de la LCQ, la nouvelle loi s’applique automatiquement en vertu de l’article 728 LSAQ.
Avec ces nouvelles règles, nous verrons dans quelques années dans quelle mesure les objectifs des autorités auront été atteints. Il serait toutefois étonnant que nous rattrapions le Delaware, ce petit état américain où, grâce à la souplesse des lois, sont incorporées plus de 100 000 compagnies par année et 60 % des compagnies faisant partie du Fortune 500...